Rechercher dans ce blog

lundi 1 novembre 2010

Comment réaliser une pièce de théâtre contemporaine

Le théâtre n'est plus ce qu'il était diront les spécialistes. Mais il est désormais ouvert à tout bon néophyte, à condition bien sûr de vous affubler de grosses lunettes noires à montures éclectiques. Porter l'écharpe est un plus lorsque vous négocierez des budgets ridicules qui pourront ultimement servir à l'éclosion d'une graine de pensée en chef-d'oeuvre de notre époque capitaliste post-joie de vivre, sexualité débridée et confiance en l'avenir. Voici donc le protocole scientifique d'une expérimentation théâtrale (de nos jours, on ne crée plus, on expérimente) :

Matériel :
- Un divan
- Des léotards noirs découpés à l'endroit des parties génitales (Toute oeuvre contemporaine se doit de montrer une certaine nudité pour évoquer le dénuement de l'homme)
- Une chaîne stéréo (ne dépensez pas beaucoup pour cet item, cela permettra à l'un de vos acteurs de le jeter au sol dans un moment de transe)

La composition du texte :
Cette partie est très facile.
1- Ouvrez Microsoft Word.
2- Prenez un dictionnaire, une Bible et un livre de citations célèbres.
3- Ouvrez le dictionnaire, la Bible et le livre de citations au hasard.
4- Écrivez douze mots observés dans le dictionnaire, suivis d'une phrase de la Bible. À chaque page de texte, intégrez une citation choisie.

Les mots du dictionnaire devront être prononcés avec une intonation forte et ponctués de silences.
Ex : Fiction ! Garage ! Baobab ! Chanson ! etc.
Le sens de ces enchevêtrements est obscur, mais c'est l'effet que vous désirez procurer. Laisser la critique établir le sens de votre pièce. Je vous prédis qu'il parlera de la dénonciation d'une société en ruines dans laquelle les jeunes ne se reconnaissent plus...

Les phrases de la Bible devront être prononcées doucement, ou chantées, c'est encore mieux. Elles serviront à créer l'illusion que dans cette société désordonnée, la douceur se retrouve dans la spiritualité et les référents culturels oubliés.

Les citations serviront à vous donnez une crédibilité. Ainsi, vous vous placez en continuité avec les grands de ce monde auxquels vous faites référence. De plus, vous aurez l'air cultivé et intelligent, les gens croiront donc que s'ils n'ont pas aimer la pièce, c'est que le sens leur est obscur. Orgueil aidant, ils feront comme le peuple dans la fable des habits de l'empereur, ils prétendront avoir tout compris et avoir apprécier la pointe d'ironie et de lyrisme qui perle de votre oeuvre.
Éléments à ne pas oublier :
- La musique : Choisissez de la musique contemporaine ou kitsch. Servez vous des chansons entre les scènes. Si possible, faites dansez vos acteurs sur la musique de manière débridée. Heureusement, la grâce n'est pas nécessaire, plus les mouvements sont saccadés et étranges à la vue, mieux c'est. Lors de la dernière scène, demandez à un acteur de briser le stéréo. Cela signifiera que dans cette société qui n'arrête jamais, l'être humain dénaturé a soif de tranquilité.

- Les hurlements

- Briser le quatrième mur : À un certain moment dans la pièce, il est de bon ton que vos acteurs prennent d'assaut les couloirs et les sièges de la salle de théâtre. Provoquer une conversation avec vos spectateurs, n'hésitez pas à les toucher légérement (tapotement de la tête, légère caresse sur la joue).

Voilà tous les ingrédients nécessaires à la création d'une pièce de théâtre contemporaine. N'oubliez pas de la faire durer au moins quatre heures. Cela laisse le temps au spectateur de rêvasser et de penser à votre mère.

3 commentaires:

  1. J'ai essayé ton procédé de création. Voici ce que ç'a donné :

    « Papiste ! Volvaire ! Compromis ! Ébaubi ! Gens ! Masse ! Taliban ! Coracoïde ! Barème ! Pragmatisme ! Taiji ! Introduire ! Recommande aux riches du présent siècle de ne pas être orgueilleux, et de ne pas mettre leur espérance dans des richesses incertaines, mais de la mettre en Dieu, qui nous donne avec abondance toutes choses pour que nous en jouissions. Lichtenberg avait l'aphorisme suivant : “ Il s’étonnait que les chats eussent la peau percée de deux trous précisément à la place des yeux. ” »

    Wow ! L'embryon anémique d'une œuvre dont le penchant eidétique est autrement admirable ! tu veux être ma co-productrice ?

    RépondreSupprimer
  2. Ce commentaire a été supprimé par un administrateur du blog.

    RépondreSupprimer
  3. Wow, sérieusement, le résultat pourrait vraiment être du théâtre contemporain!

    RépondreSupprimer