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lundi 25 octobre 2010

Le stade "fucking"

Pour atténuer quelque peu le Guide du Québec à l'usage des Français, j'aimerais aborder un aspect un brin loufoque du Québécois en exil dans un territoire anglo-canadien. Au cours de ce que l'on appelle : "Le processus d'immersion", le Québécois passera par plusieurs stades avant d'atteindre ce nirvana linguistique qu'est le bilinguisme.

1- La peur

Ce stade survient généralement dans un dépanneur ou dans une cantine d'aéroport. Dès le traditionnel "Hello" émis par le caissier (ou la caissière, ou tout simplement clerk, ça évite toute discrimination), le Québécois arborera un air ahuri, un regard fuyant et laissera passer trois secondes avant de s'exprimer dans le pire anglais qui soit.

Exemple de phrase typique de ce stade :
- " I want a... chose là heu... gas."

2- La paranoïa discriminatoire

Ce stade survient lorsque le Québécois ne parle pas assez bien anglais pour être compris immédiatement. Il sera cependant persuadé que si les Anglos ne le comprennent pas, c'est parce qu'ils détestent les Québécois. Pour quelques semaines, il aura alors une excuse parfaite pour ne pas s'intégrer.

Exemple de phrase typique de ce stade :
-"Pourquoi il ne se force pas, lui, pour parler anglais."

3- Le stade "alcool"

La crainte et le sentiment d'exclusion du début sont disparus, surtout lorsque le Québécois se rend compte qu'il n'a pas l'apanage de la consommation abusive de boissons alcoolisées. Après quelques soirées bien arrosées au sein de la communauté anglophone, voilà que le Québécois est persuadé de posséder un excellent anglais, mais qui ne se manifeste qu'en état d'ébriété. Ce stade se remarque également par des déclarations d'amour envers les anglophones, mettant l'accent sur les ressemblances entre les deux solitudes.

Exemple type :
-"In fact... we love you en maudit."

4- Le stade "fucking"

Le Québécois a maintenant un travail. Une routine salutaire s'est progressivement installée dans sa vie. Il peut maintenant s'exprimer en courtes phrases simples. Le vocabulaire est cependant restreint, c'est pourquoi le Québécois recoure alors aux mots "fuck" et "fucking", qu'il parsèmera généreusement dans toutes ses phrases. Ces mots servent à accorder un délai temporel afin de trouver le mot suivant.

Les applications linguistiques des dérivés du mot "fuck" sont utilisées de façon erronée par le Québécois. Premièrement, leur utilisation est trop fréquente et survient dans des contextes inappropriés pour être socialement acceptable. Deuxièmement, il les utilise parfois comme des comparatifs, ce qui leur confère un sens nul. Exemple : "He's cool like fuck." (Ne riez pas, je l'ai déjà entendu... et peut-être même utilisé...damn !)

Après avoir traversé tous ces stades, le Québécois est alors prêt à franchir la barrière poétique du bilinguisme. Il rêvera en anglais, perdra progressivement son accent québécois lorsqu'il s'exprimera et oubliera le genre des mots. Le retour à la mère patrie se chargera de la rééducation de notre Québécois. Pendant quelques semaines, le texan et l'accent du Lac se côtoieront dans une envolée mélodique digne des grands opéras de ce monde. Puis il se remettra à sacrer. Ce retour langagier se manifeste toujours en hiver, étrangement.

Say "Hi" to your mother !

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